Brexit: accord ou rupture, tel sera le choix
Boris Johnson est sommé de dire s’il entend respecter ses engagements et s’il veut une relation commerciale ambitieuse avec l’Union ou le traitement réservé à un simple pays tiers après le divorce. Les Européens n’y croient plus. Seul leur négociateur, le Français Michel Barnier, espère encore. Mais il souffre.
« Nous ne pourrons pas continuer éternellement comme ça ». Michel Barnier est frustré. Le 4e round de négociations avec les Britannique s’est une nouvelle fois terminé sur un constat d’échec. De l’autre côté de la Manche, son interlocuteur , David Frost, a laconiquement confirmé l’impasse d’une phrase: « les progrès restent limités ». Cela veut dire la même chose, a reconnu un négociateur.
Britanniques et Européens jouent à « je te tiens par la barbichette » depuis des mois. Chacun espère que l’autre va céder. Mais le Savoyard est solide. Son mandat est en béton et l’unité des 27 tient, même si certaines capitales se montrent « nerveuses », confie un responsable européen.
Cette nervosité a gagné Michel Barnier. En terme très policés, il a traité Boris Johnson de parjure. « Le Premier ministre britannique a signé en octobre dernier une déclaration politique qui fixe les conditions de notre futur partenariat. Ce document existe dans toutes les langues, y compris en anglais. Il n’est pas difficile à lire et il s’agit du seul point de référence valable ».
« Nous attendons des Britanniques qu’ils respectent leurs engagements. Or round après round, ils essaient de se distancier de cette base commune », a-t-il déploré.
Une réunion de haut niveau est prévue en juin. Boris Johnson va devoir s’expliquer avec Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, et Charles Michel, le président du Conseil.
Le Premier ministre britannique n’aura pas besoin de faire le déplacement à Bruxelles. La pandémie qui frappe durement son pays et mine sa popularité, empêche tout déplacement. L’entretien se fera en vidéoconférence.
« La réunion sera l’occasion de demander à Boris Johnson s’il reste fidèle à cette déclaration politique. Si la réponse est oui, comme nous l’espérons, alors nous pourrons aboutir à un accord », a averti Michel Barnier.
L’idée est d’organiser cette vidéoconférence avant le sommet européen du 19 juin, pour permettre aux dirigeants des 27 de prendre acte des décisions et des engagements de leur ancien pair.
Ils n’attendent rien. Boris Johnson devrait confirmer son refus de demander une prolongation de la période de transition et son attachement à la déclaration politique. « Les 27 pourront acter ces positions, dire qu’ils se préparent à un no deal et passer aux autres sujets bien plus importants », a expliqué un responsable européen.
« Se préparer pour un no deal ne veut pas dire qu’il aura lieu », a-t-il précisé. Les accords dans l’UE se font toujours au dernier moment, sous pression et dans une atmosphère de haute tension. Mais le temps presse. Il reste un peu moins de 7 mois jusqu’au 31 décembre.
Un nouveau round est planifié fin juin ou début juillet, a-t-il annoncé. Les Britanniques semblent pressé d’en finir. « Nous avons besoin d’un processus plus intensif », insistent-ils. Pas question d’une longue négociation.
Michel Barnier est circonspect. « Je suis quelqu’un de pragmatique, je ne suis pas un dogmatique, contrairement à ce que veut fait croire un certain +spin+ britannique », dit-il. « Tout accord commercial est lié à un accord sur la pêche et à un accord sur un cadre pour une concurrence ouverte et équitable. Il n’y a rien de nouveau dans cela. Personne ne peut être surpris. Or aucun progrès significatif n’a été enregistré sur ces points », souligne-t-il.
« Compte tenu des divergences, nous aurons besoin de 3- 4 mois. Et pour cela il faut ouvrir le jeu. Or les Britanniques ne m’ont pas donné le sentiment de vouloir entrer dans le jeu, d’où ma déception ».
« On a l’impression qu’en ce moment, nous sommes implicitement confrontés à un choix binaire: une option est le type de traité que l’UE a proposé et l’autre alternative semble être tout simplement de ne pas s’entendre du tout », se défendent les Britanniques. Accord ou rupture: telle est la question. Tel sera le choix.