2023: l’émancipation de l’Europe

2023: l’émancipation de l’Europe

Conflits, virus, tensions, scandales et morts. L’année 2023 ne sera en rien nouvelle, hélas. Mais les crises ont réveillé la vieille Europe. Elle s’arme. Elle se défend. Elle reste unie, tant bien que mal. Le moment de son émancipation est venu. Trouvera t-elle des dirigeants capables de l’entrainer ? Pour le moment, aucun ne s’est révélé. Mais il ne faut pas désespérer . « En 2023? La poursuite de la guerre en Ukraine, la montée des tensions avec l’Iran, inquiétudes sur la Turquie, incertitudes en Chine et toujours le populisme en Occident ». Je partage ce constat exprimé par Gérard Araud, le plus lucide de nos anciens ambassadeurs. Inutile de faire l’autruche et d’adresser des voeux mensongers pour 2023. « Du sang, du labeur, des larmes et de la sueur, je n’ai rien d’autre a offrir ». Cet avertissement lancé par Winston Churchill  en mai 1940 est à nouveau valable aujourd’hui, 43 ans plus tard.

L’Union doit se ressaisir, sortir de sa  zone de confort. La guerre déclenchée par Vladimir Poutine pour s’emparer des riches terres agricoles de l’Ukraine et de sa position géostratégique sur la Mer Noire a chamboulé beaucoup d’idées reçues. Le président russe doit perdre cette guerre et l’Union doit intégrer l’Ukraine. « Aider l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra, quoi qu’il en coûte », ne doivent pas être des paroles en l’air. Les 27 sont restés unis pour adopter des sanctions qui ruinent la Russie et seront bientôt intenables. Le Hongrois Viktor Orban a accompagné le mouvement . « Il faut tenir l’hiver », expliquait un négociateur européen après l’adoption des sanctions pétrolières. Grace à « la Nina », il  s’annonce doux et l’UE devrait tenir . Mais le changement climatique va nous jouer de mauvais tours. L’accès a l’eau devient le prochain défi. La sécheresse de 2022 a été un aperçu.  L’UE a les outils pour résister. La Commission a élaboré une liste de conseils et de recommandations . Il suffit de les suivre.

Les Européens savent ce qu’ils doivent faire. Réarmer pour  se protéger et continuer à aider l’Ukraine. Protéger leurs terres agricoles pour assurer leur sécurité alimentaire. Investir dans le savoir pour conserver l’avantage sur les copies asiatiques. Et se faire respecter de leurs ennemis comme de leurs amis. Le modèle de croissance fondé sur le gaz russe pas cher, l’accès au marché chinois et la protection américaine s’est effondré. La Russie est redevenue l’ennemi et aucune concession n’est envisageable, car Vladimir Poutine nous hait. La Chine a également basculé dans le mauvais camp, celui des rivaux. Son marché se ferme, elle bafoue nos valeurs et n’a aucun respect pour une Union qu’elle méprise, car elle la juge faible. Même les Américains, nos amis et alliés, nous considèrent comme des vassaux insignifiants . Qu’ils soient Républicains ou Démocrates,  ils n’aiment pas l’Europe, sa monnaie, ses règles et cherchent pas tous les moyens à diviser l’Union pour continuer a dominer le Vieux Continent.

« Le destin de l’Europe n’et pas d’être un partenaire junior des Etats-Unis » . Ces mâles paroles ont été lancées par un responsable européen lors d’un entretien au lendemain du dernier sommet européen de l’année 2022 marqué par une discussion animée sur les conséquences du plan de 370 milliards de dollars en subventions annoncé par Joe Biden pour relancer la machine américaine. Avec cette mesure et une énergie 4 à 5 fois moins chère , l’Amérique va attirer les entrepreneurs européens comme le sucre les abeilles.

« Nous ne devons pas être naïfs « , a plaidé le président du Conseil européen Charles Michel.  « Ce plan d’investissements va avoir des conséquences pour nous et nous devons réagir. Ne nous berçons pas d’illusions. Les Américains ne le changeront pas. Nous devons nous mettre en ordre de marche et agir de manière massive et urgente », a plaidé l’ancien Premier ministre belge.

La Commission européenne est mobilisée. Ursula von der Leyen, sa présidente, veut  présenter en janvier un projet de fond souverain. « Nos industries de pointe vont aller investir aux Etats-Unis et non en Europe du fait des subventions américaines et des prix bas de l’énergie. Nous devons permettre des financements européens pour nos projets importants et le faire maintenant pour que nos industries restent en Europe »,  a-t-elle expliqué.

Quelle sera la dotation de ce fonds et d’où viendra l’argent ? Mystère. Décrit comme un « instrument de puissance »,  le fond devrait permettre des prises de participation dans les secteurs stratégiques en Europe, notamment l’énergie, la défense et la sécurité, les innovations technologiques.

Le président français  Emmanuel Macron est à fond sur cette ligne. « L’UE doit donner une réponse au plan américain. Nous devons réagir avec force  pour défendre nos grands projets dans les technologies vertes et nous devons aller vite » , a-t-il  lancé.

Il est le seul. La plupart des dirigeants européens sont restés évasifs. « Il y a un consensus fort autour de la table pour considérer les Américains comme des amis, des partenaires proches.  Peu sont prêts à rivaliser avec eux,  malgré un  risque de sur-dépendance vis-à-vis des Etats-Unis « , a raconté un participant à l’issue du sommet.  Les « frugaux » ont a nouveau émis des objections à l’idée de débourser pour l’Europe et l’Allemagne s’est ralliée aux Néerlandais et aux Nordiques. Le Belge Alexander De Croo n’a pas été tendre. Il a dénoncé le jeu de qui a les poches les plus profondes dans une allusion claires aux plans de relance nationaux présentés par l’Allemagne et la France et a mis en garde contre le risque de désindustrialisation de l’Europe.

Faut-il en déduire que l’Union est vouée à l’échec chaque fois qu’elle tente de se ressaisir et donner ainsi du grain à moudre à ses détracteurs souverainistes et europhobes ? Non.  Trois fois non.  C’est quand nous sommes acculés que nous sommes les meilleurs, comme l’a montré la facilité pour la reprise financée par un emprunt commun de 750 milliards d’euros adoptée pour sortir de la crise provoquée par la pandémie du Covid.  A nouveau il a urgence à réagir et l’UE se doit d’être à la hauteur. C’est mon voeu pour 2023

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